« La démarche design fait partie de notre quotidien » – Entretien avec Pascal Gentil de L’Innovathèque

Passionné d’aéronautique, Pascal Gentil est également pilote privé et formateur dans le cadre du Brevet d’Initiation Aéronautique.

Le projet éKosse de Caroline Saier

expliqué par Jocelyne Le Boeuf, directrice des études

Qui n’a pas hésité avec émotion lors d’un déménagement à se séparer de veilles choses usées ? Est-ce parce que l’objet – sait-on jamais – pourrait encore servir, qu’on le garde finalement ? Ou bien n’est-ce pas le plus souvent le signe de notre attachement à la mémoire dont il est porteur ?

Cette dimension de l’objet qui échappe à l’utilitaire, et que le sociologue Jean Baudrillard renvoie à l’ « irrationalité des besoins » (Le système des objets, Gallimard, 1968), a été un point de départ pour le projet de fin d’études de Caroline Saier.

Sa démarche est en résonance avec un engouement actuel pour les récits et biographies d’objets dans lesquels historiens et anthropologues s’interrogent sur les différentes vies de l’objet dans leurs significations d’usage et de signe évoluant selon les contextes sociaux et temporels (voir par exemple les travaux de l’anthropologue Thierry Bonnot). Elle renvoie également à des préoccupations contemporaines dans le domaine du design, où l’objet est pensé à partir de recherches sur l’expérience des usagers. Caroline cite en particulier Sarah-Emmanuelle Brassard (« L’objet du récit », Université du Québec à Chicoutimi, 2004) dont le travail de conception est imprégné de références à la phénoménologie.

Matière et usure

Cette notion d’expérience, de rapport à l’objet dans le temps, a conduit à une interrogation sur la matière comme contact privilégié avec l’objet et sur l’usure comme « défaillance » de celui-ci. Signe de moments de vie au contact des différents usages, l’usure peut-elle devenir une valeur et s’inscrire dans le durable plutôt que dans le jetable ? La responsabilité du designer face aux enjeux écologiques est sous-jacente à la question. Mais, pour Caroline Saier, il s’agit surtout de penser d’emblée l’usure en amont, dans la conception, comme projection de la connivence établie entre l’objet et son utilisateur.

S’asseoir

Reprenant les catégories établies par Françoise Darmon (voir l’interview Histoires d’objets), c’est finalement le siège qui permettra à l’étudiante de donner forme à son travail d’investigation. Le premier contact avec « éKosse » est le tricot qui exprime le « fait main », mais aussi les pulls troués ou déformés qui finissent en chiffon. Au fur et à mesure des utilisations du siège, l’usure du revêtement en tricot déclenche la déformation d’une seconde couche constituée d’une structure en nid d’abeille (fibres non tissées et fibres thermoplastiques) posée sur une structure en mousse de latex et fibres naturelles de chanvre. Au fil du temps, le confort du fauteuil devient indissociable des formes imprimées par les utilisateurs dont il garde la mémoire.

Tendance

Un certain engouement pour le tricot est visible actuellement (créations d’associations, actions artistiques, interventions dans le domaine urbain), comme si cette réappropriation d’une pratique tombée en désuétude exprimait, au sein de notre monde très « high-tech », un besoin de retrouver une technique plus proche de l’humain. Les petites chaussettes en tricot pour téléphone mobile sont très révélatrices de cette tendance sociale dans laquelle s’inscrit le travail de Caroline Saier.

Retrouvez Jocelyne Le Boeuf sur son blog Design et histoire(s)

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